Toute la vérité sur Nathalie de Gilbert Bécaud !
Nous vous racontons l’histoire de la plus célèbre chanson de Bécaud, et aussi de la plus importante chanson française consacrée à Moscou dans notre nouvelle vidéo.
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Ci vous préférez la lecture vous trouverez la transcription de la vidéo ci-dessous:
Et voici le texte (la transcription) de notre vidéo:
On a une raison spéciale aujourd’hui pour venir sur la Place Rouge – la chanson de Gilbert Bécaud « Nathalie » qui depuis presque 60 ans définie l’image de Moscou pour les français. Il y a des choses qu’on retient indirectement, inconsciemment, dès l’enfance ; et après on ne SE souviens plus pourquoi on a telle ou telle idée reçue. Et la chanson Nathalie en est un excellent exemple.
Nous allons écouter Bécaud ensemble et je vais commenter cette fameuse chanson
La Place Rouge était vide,
Devant moi marchait Nathalie,
Elle avait un joli nom mon guide,
Nathalie
La place Rouge vide c’est bien mais c’est un phénomène très rare, surtout les dimanches. Le Mausolée de Lenine – je confirme, il était et il reste bien là. L’auteur des paroles de la chanson Pierre Delanoë n’a jamais visité L'URSS, donc ce qu’il décrit est la projection de son imagination : il fait froid et il neige.
Il manque un ours jouant de la balalaïka... mais ça serait peut-être trop pour une chanson
La suite est intéressante : Bécaud chante qu'il va prendre un chocolat au café Pouchkine avec la guide Nathalie, c’est fort.
Qu'après le tombeau de Lénine
On irait au café Pouchkine
Boire un chocolat
D’abord, il n'existait pas de de café de ce nom à Moscou à l'époque de la chanson. Il y a plus : au début des années 60, les cafés venaient d’apparaitre a Moscou, et ils étaient très peu nombreux. Les constructeurs du communisme mangeaient chez eux a l’époque, et ne buvaient du café qu'e lors de fêtes ou d'un événement exceptionnel. Mais bon, on peut comprendre Delanoë – s’il faut un nom pour un café dans cette chanson, autant qu’il s’appelle Pouchkine.
Si moi j’inventais une chanson sur paris sans avoir mis mon pied dans cette ville, j’aurais appelé le café « Dumas » - le premier nom français dont les russes se rappellent.
Voici l'actuel café Pouchkine. C’est le restaurateur André Delos (moitié russe, moitié français) qui a bien choisi son moment et l’a ouvert en 1999 – donc 35 ans plus tard. Et je le comprends parfaitement : si chaque français arrivant à Moscou te demande ou se trouve le café Pouchkine et que tu es un entrepreneur, tu finis par ouvrir un café portant ce nom. C’est un restaurant proposant de la cuisine russe, qui reconstitue les traditions du service à table des maisons nobles russes (je dirais plutôt qui reconquête notre idée de ces traditions). En tant qu’agence de voyages nous définissons café Pouchkine comme une attrape touriste classique. Pas parce que la qualité est mauvaise ou l'addition trop salée. Juste pour le fait que ce n’est pas une adresse méconnue et gardée précieusement pour eux par les moscovites.
Je vous donne une petite astuce pour venir manger ici avec un budget modéré : il y a des formules déjeuner a 15 euros les jours ouvrables, c'est donc la bonne occasion de visiter le café sans payer une fortune.
Autre astuce : vous pouvez venir ici dans le salon de the sans manger dans le restaurant. Pour ce faire, vous rentrez par la porte de droite et prenez le "fameux" chocolat ou un dessert.
D'un point de vue commercial, appeler ce restaurant le café Pouchkine a sans doute été une excellente idée, car le lieu bénéficie d'une publicité gratuite depuis 60 ans.
Mais revenons à la chanson.
Ici encore, l’imagination féconde de l’auteur est bien loin des réalités de l’époque. Aucun touriste étranger ne pouvait accéder doublement dans une résidence étudiante, qui étaient Des établissements quasi-militaires. Or là il y va directement.
Pour le champagne, je pense qu’il ne pouvait qu’être soviétique. On peut imaginer qu’il avait amené de France une bouteille de Clicquot et l’avait prise pour cette visite guidée. Je pense que Delanoé supposait qu'il était facile d'acheter cette bouteille dans un magasin à côté de la résidence par exemple. Hélas, il ne connaissait pas nos réalités. Ici on ne buvait que du champagne « sovetskoyé »
Ensuite regardez la conversation passionnante avec les étudiants.
Une belle utopie. Une telle discussion avec des étrangers en URSS était une aventure dangereuse. Chaque faculté avait ses « cadres responsables » qui Surveillaient les contacts avec les étrangers ainsi que le contenu des conversations, et reportaient là où il faut.
S'ensuit un passage romantique : Bécaud et Nathalie restent seuls dans la chambre. Peu de monde s'en souvient, mais Bécaud a écrit une suite, 20 ans après, où nous comprenons que la nuit s'est bien passée et que Nathalie est tombée enceinte… Bref une série brésilienne, et je ne vais pas donner mon analyse de ce chef-d'œuvre de Bécaud, vous le trouverez facilement.
Nous voici à la fin de la chanson.
Il y a un intermède musical, une sorte de combinaison des éléments des musiques russes, surtout de nos danses Kazatchok et Tsigane – avec du violon, du tambourin et le principe d’accélération.
C’est une bonne technique, qui provoque tout de suite des associations avec la Russie, qui évoque ses codes culturels.
Mais pour mon oreille russe cela fait un peu trop astuce facile pour donner un côté musical russe à la chanson.
Pour une oreille française c’était sans doute une idée adaptée. Cela me rappelle un extrait connu du film des frères Cohen «The Big Lebowsky » où le personnage Walter rajoute dans tous ses monologues des histoires issues de son service militaire à Vietnam.
Idem pour Bécaud : Gilbert, peux-tu me dire ce qu'une tsigane fait là-dedans ? Mais où est le rapport, nom de dieu ?
Malgrès tous ces clichés et stéréotypes je suis plutôt reconnaissant à Bécaud de cette chanson grâce à laquelle le public français a entendu parler de Moscou. Et a appris qu’à Moscou il y avait de guides: c’est pratiquement un hommage à notre métier.